Attractivité des carrières et lisibilité des parcours patients
Des défis pour la cancérologie de demain ?Â
Le cancer représente la première cause de mortalité prématurée nationale. S’il affecte près de 400 000 nouvelles personnes supplémentaires chaque année, la concordance entre des diagnostics plus précoces et des avancées thérapeutiques inédites permet aujourd’hui de mieux dépister, de mieux prendre en charge et de mieux vivre la maladie et l’après-cancer. Les données épidémiologiques le confirment : le cancer se chronicise et les courbes de survie des patients s’améliorent depuis plusieurs décennies.
Au quotidien, les évolutions sectorielles sont multiformes, exponentielles et porteuses d’espoir. Une lutte complexe qui s’intensifie, rythmée par l’essor du marché des traitements anticancéreux, le développement de l’immunothérapie, de la médecine de précision et la mise en place des thérapies orales. En parallèle, les innovations organisationnelles révolutionnent les parcours de santé et répondent davantage aux exigences de sécurité, de qualité et de coordination exprimées par les patients et leurs proches.
Dans ce contexte dynamique, les parcours de santé requièrent plus que jamais excellence, humanisme et organisation. Des défis se précisent…
- Attractivité : la crise sanitaire a soulevé un paradoxe majeur : malgré les revalorisations financières octroyées aux soignants, jamais l’hôpital n’a connu d’aussi grandes difficultés de recrutement et de fidélisation. En cancérologie, des tensions notoires sont déjà constatées sur certaines professions médicales et paramédicales telles que la radiologie, la radiothérapie, l’anesthésie ou la médecine nucléaire. Attractivité du privé à but lucratif ? Lassitude et découragement ? Les raisons sont multiples et les conséquences inquiétantes. Face au vieillissement inévitable de la population française, nos établissements fonctionnent déjà à flux tendu. À l’horizon 2035, 30 % de la population aura plus de 60 ans, catégorie démographique au sein de laquelle surviendra la moitié des cancers dès 2050. Il est impératif de faire évoluer nos organisations pour répondre aux attentes des nouvelles générations de soignants, à savoir proximité, agilité, sens, équilibre, dynamisme et hybridation des carrières. L’investissement dans le volet RH sera central pour assurer le futur de la lutte contre le cancer.
- Formation : la complexité de la cancérologie actuelle nécessite des professionnels toujours plus experts de cette pathologie, agiles face aux innovations et capables de collaborer efficacement entre ville et hôpital au service des patients. La formation représente l’un des leviers prioritaires pour faire évoluer les carrières, donner des perspectives et libérer les énergies des professionnels. Pour favoriser le renforcement du sens pour les collaborateurs, management, souplesse organisationnelle et confiance sont trois pistes vers lesquelles tendre pour retenir les talents présents au sein de nos structures publiques et privées à but non lucratif.
- Simplification : les structures tendent aujourd’hui à se concurrencer, pour les recrutements de professionnels autant que pour les parcours des patients. À cet égard, les initiatives favorables à la simplification des rôles et à la consolidation des compétences en des unités de lieu et de moyens renforcent la lisibilité pour les patients. Les réformes européennes favorisent ainsi les comprehensive cancer center et cette orientation doit être encouragée pour offrir les expertises et les environnements de soin les plus adaptés à une oncologie de précision appelée des vœux des professionnels, des chercheurs et des usagers du système de santé.
Pour y répondre, les auteurs de ce dossier analysent des thématiques aussi variées que fondamentales pour construire la cancérologie de demain :
- L’innovation dans l’organisation des soins
• Soutenir l’innovation en oncologie dans les établissements et en garantir un accès équitable Pr Jean-Yves Blay, Sophie Beaupère – p. 282
• Contribuer à l’innovation dans un CHU Armelle Dion – p. 286
• Structurer la prévention Nicolas Portolan – p. 291 - L’organisation institutionnelle et territoriale
• Coordonner les actions européennes et nationales de lutte contre le cancer en favorisant les comprehensive cancer center Thomas Dubois – p. 294
• Les coopérations pour favoriser la prise en charge du patient et la lisibilité des parcours Nicolas Salvi, Samira Bekhti, David Thebaud – p. 298
• Les organisations pour répondre à ces enjeux Bastien Piloix, Angèle Rochereau – p. 306 - L’innovation dans les prises en charge
• Quelle appréciation des prises de traitements anticancéreux oraux à domicile ? Christelle Galvez, Anne Miermont, Pascale Sontag – p. 311
• Les enjeux de la radiothérapie Pr David Azria – p. 315
• Les défis de l’oncogénétique en 2022 Pr Dominique Stoppa-Lyonnet, Chrystelle Colas – p. 319
Dossier coordonné par :
Jeanne Bertrand
Cheffe de projet institutionnel, Unicancer
Nicolas Salvi
Directeur général adjoint, ICANS  I Institut de cancérologie Strasbourg Europe, Professeur affilié EHESP