Numéro 622 - janvier 2023dossier

réflexion

L’IA et l’éthique du soin

L’IA et l’éthique du soin

Quand on pense éthique et IA, les sujets de la protection de la vie privée et la possibilité que des données soient utilisées à l’insu des patients se posent aussitôt, d’où la nécessité d’une information suffisamment complète sur le traitement de des données ainsi que d’un retour sur leur compréhension, de manière répétée, tout au long de leur accompagnement et de leur prise en charge. Dans le futur, un dispositif technologique pourrait être amené, d’une manière ou d’une autre, à « faire des choix », mais comment établir la responsabilité entre les concepteurs, les experts sollicités, l’entreprise et, bien sûr, le médecin dans les processus d’établissement du diagnostic ou de prise de décision thérapeutique ? Et quid du contrôle des algorithmes et leurs biais potentiels ou d’une hypothétique ethic by design qui serait le fruit d’une réflexion collective, pariant sur le sens de la responsabilité sociale des concepteurs ? Sans oublier la démocratie sanitaire et le rôle de la blockchain dans ce domaine, la cybersécurité, le piratage des données ou la mise en danger des systèmes d’information…

Qu’est-ce que l’éthique du soin ? En médecine, la question essentielle se porte d’abord sur la conception de sa nature même. Pour le philosophe Dominique Folscheid, la médecine est définie comme « une pratique soignante accompagnée de science et instrumentalisée par des moyens techniques(1) ». C’est un « agir », c’est-à-dire le fruit d’un choix libre portant sur des finalités auxquelles sont ordonnés des moyens proportionnés. De fait, la confusion est largement répandue dans les termes employés pour désigner l’acte médical, entraînant un malentendu sur la nature de la médecine et révélant des positions très défensives. Schématiquement, on peut affirmer que cette confusion se fait au départ dans la traduction des termes cure et care qui structurent l’expérience soignante. L’agir soignant regroupe ces deux concepts qui doivent se traduire, l’un par « traiter » (cure), l’autre par « prendre soin » (care). Le soin est donc par essence la conjonction intrinsèque et insécable de ces deux actes. Autour de cette partition se structure un vocabulaire qui renvoie à ces deux dynamiques du soin comme deux faces ...

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