En novembre dernier, le premier robot doté d’intelligence artificielle (IA), Xiaoyi, a réussi l’examen final de médecine en Chine, en obtenant une note finale supérieure à la moyenne des étudiants. Mais Watson, l’IA d’IBM, rencontre ses premières difficultés dans le domaine du diagnostic médical… Ce qui fait dire à certains spécialistes que l’intelligence artificielle n’est pas mature dans la santé.
Pour autant, ce que nous appelons aujourd’hui le « digital », ces technologies de l’information et de la communication, ou technologies numériques, et leurs différentes applications, bouleverse quotidiennement nos vies personnelles et professionnelles, la manière dont nous percevons autrui et notre environnement, jusqu’à nous-mêmes. Leur omniprésence dans notre quotidien modifie profondément notre manière de consommer, de travailler, de nous informer, de communiquer avec autrui, de nous former, de nous divertir et de gérer nos loisirs, de nous nourrir et, bien évidemment, de nous soigner. À la faveur des révolutions en cours et à venir, notamment celles de l’intelligence artificielle et de l’Internet des objets (IoT), du machine learning, des changements encore importants sont à venir. Demain, on ne se soignera plus et on ne soignera plus comme on le fait aujourd’hui.
Par ailleurs, l’avènement des réseaux sociaux et, dans le domaine de la santé, l’émergence des communautés virtuelles de patients, ont également largement modifié les relations des patients entre eux, leur perception et la manière dont ils gèrent leur maladie et leur traitement, mais également les relations qu’ils entretiennent avec les personnels de santé qui les accompagnent.
Ces avancées laissent entrevoir les bouleversements à venir dans la manière dont nous serons soignés ces prochaines années, dans les relations entre les patients, accompagnants et les professionnels de santé, dans la manière dont les institutions de santé devront évoluer pour accompagner ces changements et, finalement, dans la manière dont les patients vivront leur maladie.
Ce numéro de Gestions hospitalières consacré aux enjeux et aux perspectives de la transformation digitale des institutions et organisations de santé couvre ces thématiques. Sont ainsi abordées différentes problématiques liées au digital, présentées par niveau d’analyse. Le premier niveau concerne le patient et sa relation à la maladie. Le deuxième est celui de la relation patient. Il s’agit d’étudier sous différents angles dans quelle mesure le digital change la place du patient et, surtout, modifie ses relations avec les professionnels de santé. Un troisième niveau d’analyse concerne les établissements et organisations de santé eux-mêmes. La façon de soigner ne dépend pas que de l’évolution digitale du soigné mais bien de la rencontre des deux évolutions, à la fois celle des praticiens et de leur réseau interprofessionnel, et celle des personnes et de leur entourage.
Laurent Bourgeon
Professeur enseignant associé, Essec