Les méthodes actuelles de gestion des hommes et des organisations ont pris un tournant particulier depuis l’avènement de la nouvelle gestion publique. Sous les évidences intellectuelles et pratiques dont il se pare, le management soulève de nombreuses questions, notamment dans les administrations publiques. S’il fait figure de science humaine à enseigner, s’appuyant sur la justification objective de la théorie, le management contient le risque de ne partir que d’a priori pour gérer les problèmes organisationnels de l’hôpital. Par ailleurs, le développement du lean management dans les services de soin, importé de l’industrie automobile japonaise, n’évite pas le rapport difficile que le service public à la française entretient avec des méthodes entrepreneuriales plus anglo-saxonnes. Avant donc de considérer toute nouveauté comme bonne, essayons d’anticiper ses limites.
La gestion d’entreprise est développée depuis près d’un siècle sous l’unique bannière du management. Le terme provient du français « ménagement (1) » et correspond à un ensemble de pratiques issues d’un corpus théorique scientifique prédéfini. Sa finalité est simple : ce sont des techniques de direction et d’organisation d’entreprise pour atteindre les objectifs que celle-ci se fixe. Sans revenir trop longuement sur les origines du management, nous pouvons simplement rappeler que la théorie du management prend forme à la fin du XIXe siècle avec Frederick W. Taylor, auteur des Principes du management scientifique et dont la question emblématique est celle-ci : « Combien de tonnes de gueuses de fonte un travailleur peut-il charger dans un wagonnet en une journée ? » Nous comprenons assez rapidement que le chef d’industrie doit pouvoir être accompagné d’universitaires dignes de penser les relations optimales entre la force de travail et l’outil ; le management devient donc une discipline intellectuelle réservée : « […] La science de la manipulation de la fonte est si vaste qu’il est impossible pour un homme fait pour ce ...