Numéro 636 - mai 2024(dossier)

Sport-santé

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L’effet olympique 2024

Entre 13 et 15 millions de touristes, 15 000 athlètes et 40 000 représentants des médias sont attendus en France pour les Jeux olympiques (26 juillet-11 août) et paralympiques (28 août-8 septembre). Pour les professionnels et les établissements de santé, l’été 2024 se traduira par une nouvelle mobilisation et un défi organisationnel. Cet évènement centennal sera aussi l’occasion de mettre en exergue et de capitaliser sur le lien sport-santé.

Depuis des mois, avec le comité d’organisation des Jeux, les autorités publiques et les acteurs de terrain, la délégation interministérielle des Jeux olympiques et paralympiques (Dijop) prépare les réponses adaptées aux besoins en matière de santé, enchaîne les simulations, les scénarios et les exercices dans un contexte d’inquiétude des soignants, de risques liés aux grands rassemblements, de désordre international, de menaces multiples activées par la surexposition médiatique (4 milliards de téléspectateurs, dont 1 milliard pour la seule cérémonie d’ouverture), et ce malgré la résolution symbolique adoptée en novembre 2023 par l’Assemblée générale des Nations instituant une trêve olympique à l’occasion des Jeux olympiques et paralympiques qui auront lieu à l’été 2024 à Paris. Le système de santé est prêt, a assuré dès le mois d’avril le ministre de la Santé, aussitôt rejoint par le directeur général des hôpitaux de Paris (AP-HP). Samu, urgences, chirurgie, soins intensifs sont les services identifiés comme incontestablement sollicités qui bénéficieront de dotations supplémentaires. Outre la polyclinique temporaire installée au cÅ“ur du village européen et gérée opérationnellement par l’AP-HP, sont identifiés des hôpitaux référents qui prendront en charge des publics spécifiques : l’hôpital Bichat (Paris 18e) s’occupera des athlètes­, l’hôpital Avicenne à Bobigny (Seine-Saint-Denis) des médias et l’hôpital européen Georges Pompidou (Paris 15e) des délégations officielles du comité d’organisation. Hors établissements, environ 200 jours de médecins urgentistes seront nécessaires. Ces médecins seront bénévoles, les JO s’étant engagés à ne pas rétribuer les médecins urgentistes pour ne pas être plus attractifs que les hôpitaux publics et les déshabiller. Au total, près de 3 000 professionnels de santé, tous volontaires, seront déployés aux côtés de 8 000 secouristes. Pour le comité d’organisation des Jeux, le budget de financement des services médicaux sur l’ensemble­ du territoire est de l’ordre de 20 millions d’euros.

Bien qu’intitulés « Jeux de Paris », ces Jeux verront se dérouler certaines épreuves sur le territoire national, engageant la mobilisation de sept agences régionales de santé (ARS) et 220 établissements, de Marseille à la Polynésie.

Au-delà de la mobilisation autour de l’évènement, l’objectif est surtout de capitaliser sur le lien sport-santé car, pour reprendre la formule de Tony Estanguet, président de Paris 2024, le sport peut tout changer !

Et heureusement, car le constat est alarmant : en France, 95 % des adultes sont exposés à un risque de détérioration de leur santé par manque d’activité physique ou par sédentarité et 73 % des 11-17 ans sont en dessous des seuils d’activité physique recommandés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En 40 ans, les enfants de moins de 11 ans ont perdu un quart de leurs capacités cardio-respiratoires. Face à cette situation, le gouvernement a décidé de passer à l’action à travers la promotion du sport santé, en déclarant Grande Cause nationale 2024 le programme « 30 minutes, bouge chaque jour ! ». Le sport-santé recouvre la pratique d’activités physiques ou sportives qui contribuent à la santé et au bien-être, conformément à la définition de la santé de l’OMS, en agissant sur les plans physique, psychologique et social. Ainsi, dans le cadre de la Grande Cause nationale 2024 et à l’occasion des Jeux olympiques et paralympiques, des journées « Pour une France en forme » sont organisées dans chaque région du 10 avril au 4 juin 2024 et de nombreuses initiatives sont prises par les ARS, les collectivités locales, les établissements sanitaires et médico-sociaux. Le projet Team-Sports propose une approche interdisciplinaire visant à améliorer la dynamique de groupe et les performances dans les sports d’équipe d’élite. Il permet de mettre en lumière la contribution des chercheurs dans l’amélioration des performances des sportifs, et le développement des connaissances trouvant des applications dans de nombreux secteurs, tels que la pharmacologie, les matériaux, les neurosciences, la psychologie ou encore la médecine. Les établissements de santé sont naturellement engagés dans cette valorisation du sport/santé dans leurs actions de prévention, de soins et de recherche. Ils accompagnent les sportifs de haut niveau et tirent des enseignements de cette relation en termes de management et performance. Ils auront aussi à gérer les organisations et équipements mobilisés pour les Jeux et à tirer à profit de cet exceptionnel retour d’expérience. Enfin, les Jeux paralympiques seront l’occasion d’inves­tir dans l’accessibilité et l’intégration. 

Gestions hospitalières, qui a consacré en février 2020 un numéro au sport/santé, a souhaité illustrer à nouveau la contribution des établissements et des autorités sanitaires à travers quelques initiatives à la veille de l’ouverture des Jeux olympiques et paralympiques Paris 2024. Ce dossier a été réalisé avec le concours des élèves directeurs d’hôpital de la 62e promotion de l’EHESP.

Jean-Michel Budet
Directeur de la rédaction

 


Pour aller plus loin

  • « Les Nations unies et la trêve olympique » www.un.org/fr/olympictruce
  • « Pour célébrer sa 32e édition, la Fête de la science mouille le maillot !  », mai 2023.
    « Team-Sports, les sports collectifs accompagnés par la science pour Paris 2024 », mars 2024. www.enseignementsup-recherche.gouv.fr
  • ARS IDF, « Pour une France en forme : retour sur l’étape francilienne de la Grande cause nationale 2024 », 15 avril 2024 www.iledefrance.ars.sante.fr
  • Loi n° 2022-296 du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France.
  • « L’activité physique sur ordonnance » www.prescriforme.fr
  • Paris 2024, « Plan Héritage et durabilité des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 » medias.paris2024.org
  • The Conversation, « Le sport dans les livres et les dessins animés pour la jeunesse : du jeu à l’éducation ? » theconversation.com
  • Institut national du cancer, « Activité physique et cancers : des bénéfices prouvés pendant et après les traitements », août 2022
    www.e-cancer.fr

 


Hommage

La promotion EDH Axel-Kahn (2023-2024) 

En prenant son nom, notre promotion a souhaité rendre hommage au parcours du Pr Axel Kahn, mêlant renommée académique et engagement humaniste.

Médecin généticien et chercheur, Axel Kahn a d’abord contribué directement avec ses équipes à la recherche biomédicale française avant d’assumer des responsabilités institutionnelles : premier directeur de l’institut Cochin, président de l’université Paris-Descartes. La recherche constituant une des trois missions et fiertés de l’hôpital public, il nous paraissait pertinent en tant que futurs directeurs de souligner cet engagement. 

Axel Kahn a également été très mobilisé sur le plan de l’éthique, au Comité consultatif national d’éthique puis sur les champs du cancer et du handicap, et ses nombreux écrits nous rappellent l’importance de la réflexion éthique dans toute décision relative à la santé, y compris la santé publique. Enfin, nous souhaitions rendre hommage au patient qu’il a été et à son combat contre le cancer, cette fois à titre personnel. Combat qu’il a mené publiquement, dans les médias, évoquant avec sérénité sa propre fin de vie, contribuant à changer les regards sur la mort et la maladie.

Se définissant comme « un homme de devoir » s’efforçant d’être « raisonnable et humain », Axel Kahn nous a semblé une boussole pertinente pour notre futur exercice professionnel.

Lara Lachaussée