Deux des trois auteurs de cet article sont des hospitaliers engagés depuis longtemps dans la prévention du risque manutention des patients. Ils ont appris et déployé les méthodes de prévention les plus courantes, éprouvé et constaté la faible efficacité de leur intégration dans les pratiques hospitalières. Un important travail d’analyse critique de leur propre expérience et de recherche documentaire sur les méthodes expérimentales les ont amenés à identifier les failles des méthodes habituelles et à découvrir une alternative. Si le troisième auteur n’est pas un travailleur hospitalier, ses connaissances en prévention des troubles musculosquelettiques, son expérience dans l’accompagnement des entreprises ainsi que son écoute ont permis d’aider à la structuration et à l’organisation de la matière de ce texte, qui se veut une interpellation et une proposition à débat.
La prévention des risques liés à la manutention des malades est une préoccupation ancienne du fait de l’ampleur des dommages sur la santé des soignants. Cependant, les efforts et les espoirs mis dans les actions de prévention, notamment les investissements en matériels d’aide à la manutention et les formations, ne produisent pas les résultats attendus (1). Ce constat vaut en France comme dans les pays anglo-saxons. Les expériences menées, qu’elles soient incitatives ou coercitives (2), ne se distinguent pas dans leur efficacité. Le risque reste massivement présent et les effets sur la santé sont encore trop importants. La sinistralité des maladies professionnelles liées aux troubles musculosquelettiques (TMS) dans les établissements de santé franciliens affiliés au régime général de l’assurance maladie surpasse en valeur relative depuis 2009 celle des entreprises du secteur Bâtiment et travaux publics (BTP) (3). Ce manque d’efficacité suscite évidemment de l’agacement, des doutes et des explications diverses et contradictoires qui ne favorisent pas la sortie de crise. La résistance au changement des soignants est désignée par les uns. ...
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