La transparence, jusqu’où ? C’est la question qu’ont pu se poser les directeurs d’hôpital et d’établissements médico-sociaux qui ont dû remplir, au printemps 2017, une déclaration d’intérêts, voire, pour certains, une déclaration de patrimoine.
Ce qui paraissait, il y a encore peu, cantonné au domaine politique, imprègne désormais le secteur public. La fonction publique hospitalière n’y fait pas exception : deux décrets publiés le 30 décembre 2016 au Journal officiel fixent la liste des fonctionnaires tenus de transmettre une déclaration d’intérêts et une déclaration de situation patrimoniale. Ces décrets, pris en application de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, sont applicables depuis le 1er février 2017. Pour la fonction publique hospitalière, sont concernés par la déclaration d’intérêts les emplois de directeur de CHU et directeur de centre hospitalier régional (CHR) et les emplois fonctionnels de direction et de directeurs des soins des établissements publics de santé et médico-sociaux. Intègrent aussi les emplois concernés par l’obligation de production d’une déclaration de situation patrimoniale, c’est-à-dire « dont la nature ou le niveau des fonctions répond à des critères d’exposition à un risque d’enrichissement indu », ceux de directeur d’un établissement public dont le budget, le cas échéant consolidé, est supérieur à 200 millions d’euros.
L’hôpital et le médico-social, qui connaissaient depuis longtemps les exigences d’éthique, doivent désormais s’adapter aux réglementations en matière de transparence. Éthique, transparence : à ce duo il conviendrait d’ajouter un troisième terme, qui donne son nom à la loi du 20 avril 2016 : déontologie.
Que l’on ne s’y trompe pas : il ne s’agit pas d’une mode passagère, irritante peut-être pour celles et ceux qui ont dû remplir ces déclarations d’intérêts et de patrimoine. Il y a au contraire fort à parier que ces dispositions vont s’accroître et se renforcer. D’ores et déjà, les exemples présentés au cours de ce dossier (comme les démarches de prévention des conflits d’intérêts à l’AP-HP et au CHU de Toulouse) montrent que sur le terrain, nombreux sont les acteurs qui ont pris d’eux-mêmes des initiatives : celles-ci sont à évaluer, corriger au besoin, propager en cas de succès.
Car éthique et transparence répondent à une exigence démocratique. Ce n’est pas se faire moralisateur que de soutenir que ce ne sont pas seulement les abus, aussi déplorables soient-ils, qui le justifient ; c’est plus fondamentalement l’évolution de la société qui l’exige. L’on ne peut défendre une ambition d’exemplarité pour le service public hospitalier sans porter une même volonté d’exemplarité pour les agents qui y travaillent, à commencer par les cadres de direction.
Et ce mouvement est sûrement appelé à s’accroître : lundi 18 septembre 2017, le Comité consultatif national des corps de direction de la fonction publique hospitalière a adopté à l’unanimité une Charte de l’éthique et de la responsabilité, qui met notamment en avant « l’éthique, la responsabilité sociale et environnementale et la qualité du service rendu aux usagers et le respect du service public ». Quelques jours auparavant, le bureau de la commission des lois de l’Assemblée nationale avait pour sa part validé la création d’une mission d’information sur la déontologie des fonctionnaires et l’encadrement des conflits d’intérêts…