Il a consacré plus de 50 ans de carrière universitaire à élaborer, article après article, une anthropologie du corps, dans la lignée des travaux de l’historien Georges Vigarello. Professeur de sociologie et d’anthropologie à l’université de Strasbourg, membre de l’Institut universitaire de France, David Le Breton développe, depuis sa thèse soutenue en 1987, une recherche empruntant largement à la littérature, la linguistique et la psychanalyse, et explorant des sujets éprouvants – la douleur, le rapport au risque et les scarifications, la transplantation d’organes, etc. À l’occasion de ce numéro, nous avons souhaité le faire dialoguer avec Anujana Vathanan, cadre de santé en Ehpad, anciennement aide-Âsoignante puis infirmière. Extraits choisis d’un entretien croisé.
Loïs Giraud Dans vos carrières respectives – académique pour l’un, soignante pour l’autre –, quelles sont les grandes transformations que vous avez pu constater dans le rapport au corps ? Quels enseignements en tirez-vous ? David Le Breton À la fin des années 1980, quand j’ai commencé à travailler à l’hôpital, les sciences humaines et sociales (SHS) n’étaient pas du tout les bienvenues. C’était un univers complètement étranger pour les facultés de médecine, comme pour les hôpitaux – à la différence, cependant, des écoles d’infirmières, où j’ai énormément enseigné l’introduction aux SHS dès cette période. Mes premières collaborations à l’hôpital ont été rendues possibles grâce au militantisme de quelques médecins pionniers, comme Philippe Bagros, ancien chef du service de néphrologie au CHU de Tours. Le rapport à la douleur constitue un autre changement notable. Pendant très longtemps, il n’y a eu aucun enseignement sur la douleur dans les facultés de médecine. J’ai le pénible souvenir de patients que l’on laissait, résignés, sortir des consultations emplis de douleur, même pour les transférer dans un ...
Identifiez-vous ou créez un compte si vous ne l'avez pas encore fait. Cela vous permet de :
- Lire la suite des articles gratuits (marqués d'une puce verte).
- Lire la suite des articles payants (marqués d'une puce rouge).
Pour les abonnés, pensez à bien renseigner dans votre profil votre numéro d'abonné pour activer la lecture des articles payants.
