Numéro 525 - avril 2013dossier

Réflexion

Des mots pour penser et comprendre la santé

Des mots pour penser et comprendre la santé

Lucrèce écrivait à propos de l’origine du langage : « At varios linguae sonitus natura subegit/mittere, et utilitas expressit nomina rerum » (« Quant aux divers sons du langage, c’est la nature qui poussa les hommes à les émettre, et c’est le besoin qui fit naître les noms des choses ») (Lib. V, v. 1029-1039). Pour tout un chacun, la dénomination est une activité aussi habituelle que peu consciente. Si le nom des choses a intéressé l’Homme depuis l’Antiquité, la sémantique comme discipline n’a été fondée qu’à la fin du XIXe siècle par Michel Bréal (1832-1915). Depuis, la discipline a grandi et acquis ses lettres de noblesse cependant que le mot « sémantique » est utilisé, malheureusement, de façon souvent abusive, tout n’étant pas sémantique. S’il y a sémantisme, c’est parce qu’il y a bien quelqu’un qui interprète. Ainsi, venant d’un autre univers linguistique, celui qui doit interpréter peut parfois trouver curieux ce qui, en français et en France, a été dénommé d’une certaine manière.

Les langues ne sont pas des blocs uniformes ; elles varient et cette variation fait apparaître des dialectes (ce qui, pour un linguiste, est le plus souvent une notion géographique ou sociale, certainement pas normative). Car il ne s’agit pas de comprendre une langue mais de comprendre ce que, à un endroit précis et à un moment donné, on a fait avec une langue pour nommer ce qui doit porter un nom. Les mots de la santé sont dans ce cas de figure. Il suffit de passer les frontières de l’Hexagone pour constater des différences : institutions, personnels, objets, procédures… Ainsi la France et la Belgique, pour ne citer que deux cas, diffèrent-elles sur bien des points. Lorsqu’on donne un nom (ce qui en soi est déjà donner un avis sur ce qu’on nomme), on le fait toujours depuis un point de vue. Celui de la France n’est pas forcément celui des autres pays francophones ou de celui qui doit comprendre la santé comme le système français la comprend avec ses mots propres. La difficulté récente pour traduire en d’autres langues la notion de « redressement productif » montre bien que l’expression a été forgée depuis une manière de penser : quelque ...

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